A l’annonce de la proche mise à disposition des vaccins contre le Covid 19, les valorisations reprennent du poil de la bête, la pandémie n’ayant plus aucun effet sur elles. D’après les banquiers, les révisions de prix, comme dans le cas de Tiffany ou Coface, se font maintenant rares. Les tarifs se fixent à un montant plus élevés, avec un multiple moyen de onze fois le résultat brut d’exploitation des sociétés cibles.
À l’instar de Louis Vuitton Moët Hennessy qui a obtenu un rabais de 430M€ sur le prix d’acquisition de Tiffany, les groupes d’entreprises françaises ont bénéficié de l’effet de la pandémie sur les prix. Dans les M & A, celui-ci tend pourtant maintenant à diminuer. Il y a plusieurs raisons à cela ; notamment l’élection présidentielle aux Etats-Unis, la promesse de vaccins contre le Covid 19, etc. Ainsi, les acheteurs ne peuvent plus jouir, pour un certain moment encore, des renégociations de prix issues de la crise économique. Selon les banquiers d’affaires, cette époque est désormais révolue.
Dès qu’un vaccin efficace sera mis à disposition, on repartira dans une nouvelle phase de croissance selon le président d’une enseigne de fusions-acquisitions. Même si bon nombre de professionnels tablaient sur la fin de la hausse des prix dans le marché de fusion-acquisition en 2019, ils se sont trompés, ceux-ci s’élevant de plus belle.
Certes, le marché a reculé de 39 % lors des 6 premiers mois de cette année, un chiffre qui n’est plus que de 11 % à mi-novembre, avec 2.900 Mds $ de contrats signés à travers le monde. Avec 300 à 400 Mds $ d’accords signés par mois durant le dernier trimestre 2020, le marché des fusions-acquisitions s’avère encore plus prospère qu’avant la pandémie.
Les multiples d’acquisition eux, restent toujours bas. Ils sont actuellement de 11 fois l’EBITDA des cibles, alors qu’en 2019, ils étaient de 11,3 et en 2018 de 12,2 fois, au niveau mondial. Le montant médian est de 10,4 fois cette année contre 11,3 en 2019 aux États-Unis. Ce chiffre est encore en baisse en Europe, de 8,9 fois actuellement alors qu’il était de 10,3 fois en 2019.
Les États de plus en plus vigilants
Cependant, certains secteurs clés considérés comme sensibles tels que la défense qui reste toujours bien surveillés par les États. Les règles dans ces secteurs s’y sont même durcies et la pression, toujours présente. C’est le cas de Photonis en France que Teledyne a finalement pu acquérir avec une baisse de prix de 15%. En raison du renforcement de cette protection, certaines conditions devront être révisées. Les acheteurs venus du Pays de l’Oncle Sam et de l’Asie qui sont les plus intéressés par quelques-uns de ces actifs sont moins enclins à négocier, une situation qui peut aussi faire baisser les prix.
Ces rabais sont pourtant bien terminés. Alors qu’on était encore dans le confinement total au second trimestre 2019, les valorisations se trouvaient à un niveau très bas. Elles stagnaient à 10,7 fois l’EBITDA à l’échelle mondiale. En Europe, les prix d’acquisition des petites et moyennes entreprises s’élèvent maintenant à des niveaux historiques, de 10,1 fois d’après l’indice Argos.
Les révisions de prix sont bel et bien terminées maintenant selon un professionnel dans le métier. Pour preuve, la hausse de 20 à 30 % des cours de Bourse de la majorité des premiers secteurs atteints par la crise sanitaire comme celui de l’aérien ou de l’hôtellerie. C’est le cas de Pfizer qui a pris 4.000 Mds $ de valeur en une séance après son annonce.
D’après un autre responsable d’entreprise, les conséquences de la pandémie sur les valorisations n’atteignaient pas tous les secteurs et ne les atteindront sûrement pas. Ceux qui y ont résisté comme celui de la technologie misent sur la hausse de leur valorisation pour acquérir à des prix élevés des actifs stratégiques afin de consolider leur position par rapport à la concurrence ou s’en servir comme barrière à l’entrée. On cite aussi en exemple Nexia et SIA, des experts en paiement italiens qui ont fait savoir leur fusion pour 15 Mds. Ils ont aussi racheté le danois Nets pour 8 Mds environ alors que les multiples sont aux alentours de 20 fois dans le secteur.
D’autres cas
Les tarifs élevés ont leur place dans la Bourse. En effet, les transactions à des multiples élevés sont bien accueillies dans les marchés à condition qu’elles satisfassent à un objectif stratégique ou créent d’importants partenariats. C’est le cas de Schneider qui a acquis OSIsoft en août pour la somme de 5 Mds. Malgré son haut niveau de valorisation de 10 fois plus le CA, la Bourse a reconnu ce rachat de l’expert en logiciel. Celle-ci considère le secteur de la technologie comme un créateur de valeur ajoutée.
Cependant, le marché est toujours binaire, car les prix sont soumis à des pressions dans les secteurs atteints par l’impact de la crise sanitaire. Malgré cela, les entreprises peuvent toujours négocier ou prendre leur mal en patience.
Certaines transactions peuvent encore faire l’objet de révision de prix comme celle entre EssilorLuxottica et GrandVision, dont il revient à la justice néerlandaise de trancher. Il en est de même pour la Coface, mais aussi pour l’américain Simon qui a baissé de 800 M$ sur les 3,6 Mds attendus son prix d’acquisition du Taubman. Les Français ont aussi bénéficié de cette renégociation, comme Louis Vuitton Moët Hennessy qui a diminué de 430 M de dollars sur les 16,2 Mds $ prévus, le prix de rachat de Tiffany. Pour acquérir Bombardier, Alstom, lui, a obtenu un rabais de 500 M à 1 Md, soit un prix de 5, 3 Mds d’euros.